Il y a des destinations qui se prêtent aux fantasmes les plus fous... des destinations qui font rêver... des soi-disant paradis....
Il faut bien reconnaître que depuis le début du voyage, mis à part les montagnes népalaises et la côte australienne, je suis un peu frustré du point de vue des paysages d’exception.. ou blasé.. peut-être un peu des 2 !...
Alors après la Nouvelle Zélande, inutile de dire que j’étais méfiant, que je n’avais aucune attente particulière autre que celle de me reposer, je faisais fi d’un éventuel coup de cœur; étant bien davantage préoccuper à négocier au mieux la fin du voyage que d’admirer l’environnement dans lequel j’allais évoluer.
Après les 2 premières semaines en famille, j’ignorais encore si les beautés suggérées et les premières impressions laissées par la Polynésie étaient davantage liées aux retrouvailles qu’à la réalité de ce que j’avais vu....
Il va de soit que la Polynésie est magnifique !!
Oui, à l’instar de ce que nous pouvons voir sur les milliers de photos d’Instagram ou sur les plus beaux albums photos existants : la Polynésie est stupéfiante et paradisiaque....
Nous avons passé 2 semaines splendides en famille et avons pu se rassurer en plus sur notre «nouvelle» capacité organisationnelle.
Mais les 3 semaines qui ont suivi l’ont été tout autant.
Je redoutais, nous redoutions de nous retrouver tous les 3, seuls, un peu abandonnés avec les démons de la Nouvelle Zélande encore en mémoire et la perspective de devoir “encore” voyager 5 mois.
Nous avions ici anticipé, réservé nos vols inter-îles et nos hébergements en prenant soin de s’accorder un minimum de 7 nuits par endroit, histoire de vraiment prendre des vacances dans ce voyage.
Nous en étions sûr, si nous continuions sur ce rythme effréné, tout du moins un rythme qui ne nous convenait plus, celui-ci allait finir par avoir raison de nous et de notre aventure.
Nous avons constaté lors de longues conversations avec d’autres voyageurs et cela malgré les similitudes apparentes, qu’aucun voyage n’est semblable.
Que ce soit de part sa genèse, les individus qui composent le groupe, les choix de destination, de thématique, des rencontres, du budget, les évènements inattendus, les projets post-voyage etc.... chacun apprécie ce moment forcément différemment, appréhende le voyage sur un rythme qui lui convient.
Une chose semble unanime ou presque, tout le monde a “son coup de mou”, ce qui je ne le cache pas, m’a particulièrement rassuré.
La semaine qui a suivi le départ émouvant de la famille, nous sommes allés nous perdre à Huahine, « la sauvage »...
Paradisiaque !!
Oui il faut le dire, nous étions en plein rêve !!
Un accueil surprenant mais pour le moins bienveillant de Flora...
Après, Cédric et Amandine, Jean-Denis à Tahiti nous voici chez Flora...
Que dire si ce n’est que ce fût extraordinaire du début à la fin... que nous étions tristes, après 8 nuits passées dans son paradis perdu, de quitter notre hôte.
Nous avons pris du plaisir tellement notre rythme était lent, enivrant, envoûtant et planant... même dans les nuits où nous étions bercés par les vagues cognant la barrière de corail si proche à cet endroit de l’île....
Nous y avons fait des rencontres insolites : Marina, l’expatriée française à Tahiti, en vacances ici avec son pote Pierre Alexandre, lui, spécialement venu de la métropole.. des gosses... l’âge de nos filles et n’ayant pas froid aux yeux...
Marc, le québécois, Rebecca, la galoise et encore quelques autres.....
Partager les repas préparés par Flora, capable d’enfiler d’une heure à l’autre son costume de Master Chef Polynésie et celui de chauffeur pour aller vous chercher à l’aéroport.
Une fois n’est pas coutume, nous étions côté « sunrise ».. quel bonheur pour un lève tôt comme moi d’aller observer les « pointes noires » se dandiner sur le lagon agité avec la lumière rasante du soleil prenant son envol quotidien.....
Entre baignades, pétanque, la visite de cette île “sauvage”, l’observation des anguilles sacrées et de leurs beaux yeux bleues, les parties endiablées de snorkelling entre Pierre Alexandre et notre Pierre, quelques balades en paddle et à pied, j’ai aussi débuté la préparation de mon retour...
Oui, mon retour... principalement le mien puisqu’il s’agit de mon retour dans le monde professionnel...
J’ai “enfin” lâché prise à ma manière, je me suis occupé de moi et par voie de conséquence de nous, de mes compagnons de route et de notre avenir.
J’ai tellement entendu dire dans les mois qui ont précédé notre départ, de bon nombre qu’il ne fallait pas penser à l’avenir ni au passé mais qu’il fallait uniquement vivre le moment présent que j’y ai réfléchi car pour moi cette philosophie de l’instant présent était très abstraite.
Alors au début de ce voyage, je me suis fixé comme objectif de ne pas penser à l’avenir et d’essayer d’oublier le passé comme si cela était la seule méthode pour accéder au bonheur du moment.
“Déconnecte” ai-je tellement entendu dire “Ne pense pas à l’avenir, tu verras bien !!”
Exactement comme les parents disent à leur enfant « arrête avec ton téléphone » alors que la greffe de la 3ème main opérée par Apple sur leur propre corps a très bien prise (je parle en connaissance de cause !).
En octobre dernier, “perché” à Katmandou, j’ai revendiqué cette situation si surprenante et agréable de ne “rien” faire...
En novembre, j’ai vilipendé le “conformisme”.... considérant que celui-ci nous “oblige”.
Je n’ai aucun regret quand à ces positions tranchées, j’aime toujours ne “rien” faire, cette activité est saine voire thérapeutique.
Quant au “conformisme” tel que nos sociétés nous l’imposent, il me déplaît.
Je déteste, j’exècre l’idée que nous devrions dès notre plus jeune âge suivre une seule voie : celle de la “réussite” scolaire et sociale notamment pour être une bonne personne, heureuse et s’accomplir exclusivement de cette façon là...
Il n’en reste pas moins que je n’ai jamais détesté “ma vie d’avant”, il fallait juste lui redonner du sens et un nouvel élan.
Visiter une infime partie de la planète en aura été l’occasion, et comme dit Confucuis : “le plus grand voyageur est celui qui a su faire une fois le tour de lui-même.”
J’ignore bien si je suis un grand voyageur, je n’en ai pas la prétention et de toute façon je n’ai jamais eu cet objectif mais je pense avoir réussi à faire au moins une partie de cet exercice...
J’ignore encore ce que ce voyage entraînera comme conséquences plus tard sur nous ou sur moi mais au moins je sais maintenant ce dont j’ai besoin pour apprécier le moment présent.
Je ne suis pas un homme pressé comme Luchini (Un homme Pressé - 2018), je n’ai pas très envie de suivre sa trajectoire.
De me projeter....
Car oui, j’ai besoin d’avoir des projets en permanence, cela me nourrit et me permet entre autres, d’apprécier ce que je vis maintenant.
J’ai pris le temps nécessaire à une remise en question suffisante tant sur un plan personnel que professionnel : cette aventure m’aura déjà servi à comprendre les raisons qui m’ont poussées à prendre ces décisions importantes en début d’année 2018.
Alors, bercé par les vagues de Huahine, je me suis connecté à nouveau au monde qui est aussi le mien : celui de l’automobile et ça me remplit de joie, d’énergie et d’ambitions.....
I’ll be back ! and I’ll be stronger ....
Je suis certes heureux d’avoir passé ce temps si précieux avec Pierre et Stéphanie mais je n’y vois ni une révélation, ni une finalité mais juste la parenthèse dont j’avais besoin, de surcroît en effectuant un projet familial d’envergure.
Je le sais, dorénavant mis à part un problème indépendant de notre volonté, nous irons ensemble et solidaires au bout de notre aventure, qui se terminera début juillet, après une fin en apothéose chez nos amis dorénavant guadeloupéens Zoé, Stéphanie, Ugo et Eric.
Mais pour ne pas aller trop vite, revenons à la Polynésie....
Après Huahine, c’est « la perle du pacifique » qui nous attendait... Bora Bora...le clou du spectacle !
Et bien, non, pas vraiment.. pourquoi ??
Je suis pourtant arrivé dans d’excellentes dispositions mais il faut bien reconnaître que la semaine que nous avons passé chez D et L (je tais volontairement leur nom) n’a pas été mémorable du point de vue de l’accueil et cela nous a surpris compte tenu de nos précédentes expériences en Polynésie.
Imaginons que l’on vous accueille avec un collier de fleurs gentiment « jeté » autour du cou et que l’une des premières choses que l’on vous évoque est que « le métier d’hôte m’exaspère et que j’arrête tout cet été », forcément même avec 35 degrés au mercure, ça refroidit !!
Je vais donc m’abstenir de citer en revue cette expérience des plus moyennes mais qui a forcément eu de l’influence sur notre perception de cette île, si réputée...
Cependant même en étant objectif, très honnêtement cette île ne présente un intérêt que de l’extérieur, vue depuis les motus ou le lagon..
Intérieurement, rien à voir avec Tahiti, Mooréa et Huahine... il n’y a rien à voir si ce n’est la seule plage de l’île : Matira qui il faut bien le reconnaître est plutôt très belle.
On gardera en souvenir le tour du lagon en pirogue avec Pierre Alexandre et Marina que nous avons retrouvé ici après Huahine : les escales parmi les requins citrons, les pointes noires, les raies et le repas les pieds dans l’eau avec ces mêmes poissons...
Mais en «tour du monde», il arrive que nous ayons des idées farfelues et que nous laissions place à l’aventure, celle qui présente quelques “risques”...
Je ne comprenais pas pourquoi il n’existe pas de services maritimes de transport de personnes entre Bora Bora et Maupiti, la petite sauvage voisine à seulement 50kms.
Après renseignements, il n’y a que de rares liaisons.
J’avais quand même lu qu’il était peut-être envisageable de solliciter directement des pêcheurs au port de Vaitape pour rejoindre l’île et négocier avec eux un transport pour un bon prix.
Nous avons tellement entendu parler de Maupiti notamment par Marina et Pierre Alexandre mais également par cette rencontre chez D et L avec Caroline et Aurélien, que nous avons tenté notre chance.
Caroline et Aurélien, un couple de jeunes globes trotteurs français, adorables de presque 20 ans nos cadets qui ont décidé de faire leur voyage de noce de 6 mois autour du monde, juste avant leur mariage prévu en août... toujours aussi belle la vie !!!
Je vais éviter de raconter la succession de petits évènements rocambolesques qui nous ont fait rencontrer Laurent, notre capitaine-pêcheur !!! Mais le vendredi... nous voilà embarqués sur son bateau pour 2h de traversée et rejoindre Maupiti avec au programme les retrouvailles « surprises » avec nos amis Pazpartout.
Nous avions prévu de nous voir sur Bora pour notre dernière soirée le jour de leur arrivée sur l’île mais nous les savions sur Maupiti... l’occasion était donc trop belle !!!
Les PAZpartout ... ACTE IV....
Encore une fois, on ne sait pourquoi il y a des rencontres marquantes !!
Dans notre vie “normale”, on se demande souvent si nous pourrions partir en vacances avec les uns ou les autres et il s’avère que ces perspectives présentent des risques importants pour l’amitié durable...
Avec les Paz, nous avons fait l’inverse, nous nous sommes rencontrés dans ce voyage et avons l’impression que l’on se connaît maintenant depuis toujours...
Il faut dire qu’entre les négociations avec les guest houses du Langtang au Népal, les karaokés endiablés dans le nord du Vietnam, les bains de sable brûlants en NZL, il fallait que l’on boive un petit coup dans les eaux turquoises de Polynésie....
Et puis est venu le temps des confidences sur ce voyage et sur ce qui l’allait en advenir... A quelques semaines du retour, nous avons évoqué le désir, le besoin voire l’impatience d’être en France avec ceux que l’on aime, d’être à nouveau chez soi dans son canapé et de retrouver une certaine routine... celle qui parfois nous manque mais que l’on appréhende tout autant, habitués que nous sommes sommes maintenant au mouvement, à l’exotisme permanent, au plaisir de découvrir un nouvel endroit, un nouveau lit, de nouvelles personnes...
Nous aurons vu et vécu tellement de choses que l’idée même de retrouver là où rien n’a changé, nous fait froid dans le dos...
A quelques semaines de notre retour, l’impression d’avoir vécu plusieurs vies en quelques mois est enrichissante mais dangereuse à la fois.
Retrouver la sédentarité est une perspective tout aussi sécurisante et reposante qu’effrayante.
Retrouver ce pays que l’on adore mais qui est aussi champion du monde de la consommation d’anti-dépresseur n’est pas un panorama des plus excitants, nous réfléchissons donc par moment ensemble à la façon dont nous allons devoir “négocier” ce fameux retour.
Malgré ces longues conversations baignées dans une eau bleue turquoise, nous avons vaqué à nos occupations réciproques: Marco, avec sa canne à pêche sur son kayak, en peine de nous ramener notre prochain repas, les enfants s’imaginant en Tom Hawks dans “Seul au monde” en construisant des cabanes de fortune, Pauline, en accompagnant les enfants danser avec les raies Mantas, Stéphanie et moi en sueur dans la montée du sommet de Maupiti en quête d’un remarquable point de vue et de quelques frayeurs dans l’ascension et descente bien glissantes.
Le lendemain de notre arrivée et déjà jour de notre départ de Maupiti, nous avons participé à la tradition “le four tahitien”, qui consiste en un repas dominical autour de mets traditionnels cuisinés dans un trou rempli de pierres chaudes et recouvert de feuilles de bananiers pendant plusieurs heures.
Laurent et son épouse sont venus nous chercher comme prévu à 15h30 pour entamer notre retour sur une mer d’huile vers Bora...
Et puis à nouveau notre “capitaine-pêcheur” décide à la moitié de notre parcours de plonger 2 lignes à la traîne.. alors que Pierre a pris la barre, nous sommes dérangés par un espadon avec lequel nous allons nous livrer à un sacré combat de presque 1 heure avant de le ramener à bord pour la plus grande satisfaction de tous.
Ce fut une grande journée de ce tour du monde comme finalement il en existe certes, mais comme dans une année “normale” ... pas tant que cela non plus....
C’est heureux que nous sommes rentrés chez notre hôte de Bora qui pour continuer dans son élan de générosité accueillante, nous demande de ne pas salir notre hébergement car d’autres voyageurs s’apprêtent à arriver le lendemain.
Nous y croyons à peine et préférons ne pas rentrer dans une polémique improductive avec cet ancien huissier de justice très vraisemblablement frustré d’avoir raté ses études d’avocat!!!...
J’ai également profité de cette semaine à Bora pour travailler en bord de piscine ou de lagon, ma stratégie qui prend progressivement forme que ce soit sur les contours même du projet professionnel que sur les contacts qui deviennent de plus en plus nombreux, pertinents et bien entendu rassurants.
L’aspect géographique n’ayant pour l’heure qu’une priorité infime, certains contacts et idées sont susceptibles même de nous amener assez loin de nos origines, projection tout aussi excitante qu’angoissante.
Nous avons choisi de prolonger d’une semaine notre séjour en Polynésie et c’est à Mooréa qui nous a tellement plu lors de notre seconde semaine en famille que nous avons jeté notre dévolu pour cette dernière partie de séjour polynésien.
“So chill” ...ainsi pourrait-on résumer cette semaine encore ponctuée d’une rencontre avec les Zagenzig... une famille d’adorables “farfelus” du voyage mais “habitués” puisque celui-ci est leur second tour du monde cette fois-ci avec leurs enfants...
C’est encore dans l’eau translucide du lagon de Mooréa que nous avons évoqué nos voyages, nos aventures et le reste...
Puis au Laggoonarium, nous avons pour une dernière fois, nagé avec les raies et requins, constaté que l’archipel polynésien était bel et bien un paradis réel où les poissons multicolores s’en donnaient à cœur joie...
Après une soirée presque déjà nostalgique avec notre dorénavant ami Jean-Denis, nous nous sommes envolés en pleine nuit pour la première fois tristes de quitter un endroit depuis le début de notre voyage...pour se confronter, ressourcés, à la dernière tranche de notre aventure sur ce si grand continent qu’est l’Amérique du Sud.
