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3 jours et 3 nuits....

Journal - Russie - 01-09-2018




Vladivostok 


Départ de Oulan-Oude le 27 août à 5h30 (Paris +6h) - Arrivée le 30 à 6h38 (Paris +8h)


Bien que la nuit fût courte, c’est très motivés que nous gagnons la gare à pied dans le matin encore noir de la capitale Bouriate pour 3 jours de train Non-Stop.

Cette fois, nous embarquons en 2ème classe pour cette dernière partie du Transsibérien. 

Le train est vieux, numéro 100, il est de ceux qui font la traversée complète de Moscou à Vladivostok soit 7 jours de voyage, certainement depuis de nombreuses années. Nul doute que celui ci a débuté sa carrière sous l’ère Soviétique..  Une sorte de Lada des voies ferrées !!




Le couloir du wagon nous menant à notre « appartement » est même pourvu sur ses fenêtres, de voiles, dont on imagine mal l’utilité... ceux ci étant ni occultant, ni particulièrement esthétiques.




Lorsque nous ouvrons notre cabine, la 4ème couchette « haute » est occupée..  Nous avions pris soin sur tous nos trajets de réserver les 2 du bas et une en haut et avons été particulièrement inspirés car cela rend le voyage beaucoup plus confortable.

Nous essayons une installation discrète et rapide, il est encore très tôt et notre « compagnon » de cabine est plongé dans un profond sommeil.




Bagages rangés, le train repart, nous attendons l’une des très nombreuses hôtesses travaillant sur ce train, facilement reconnaissables à leur costume identifié, sorte de déguisement à mi-chemin entre celui de de la pervenche parisienne et d’une hôtesse de l’air d’une compagnie low cost, ce qui leur donne, malgré une volonté non dissimulée de rigueur, ajoutée à leur sourire “Russe”, un côté fort sympathique à mon goût ! 

Chargée de nous remettre notre paquetage  : draps, taie d’oreiller, serviette de toilette... rituel dont nous avons maintenant l’habitude, elle passera outre de l’habituel second contrôle d’identité. Nous sommes les seuls à intégrer son effectif ce matin là et le 1er contrôle venait d’avoir lieu quelques secondes auparavant, lors de notre montée dans le wagon dont elle est responsable.

Comme à “l’accoutumée”, nous faisons nos lits et bien que nous soyons en tout début de matinée, nous nous couchons. 

C’est sans difficulté que nous trouvons le sommeil, désormais rompus aux réguliers cognements des wagons entre eux.

Lorsque nous émergeons en milieu de matinée, notre compagnon de cabine semblant être également dormeur averti, esquisse les premiers mouvements d’une sortie de nuit. 

Ayant certainement entendu notre arrivée et nos discrets échanges verbaux, celui ci m’entreprend rapidement dans un anglais que je comprends aisément, et qui je ne vous le cache pas me surprend, d’autant que je ressens une forme d’aisance très inhabituelle. En tous cas, dans les rencontres “railway” faites jusqu’ alors exceptée celle avec Melina.

Nous nous installons tous les 3 sur la tablette qui se trouve entre les 2 couchettes du bas afin de prendre notre petit déjeuner, que nous avons pris soin de volontairement “francisé”...  La veille, lors de nos emplettes pour ces 3 jours nous avons craqué pour pain, beurre, confiture !! Que du bonheur !

Notre compagnon, après s’être apprêté avec une élégance certaine dans les toilettes du wagon (aucune ironie cette fois-ci, il est très élégant !) prépare lui aussi son petit déjeuner à base de pâtes asiatiques déshydratées, repas très apprécié des Russes habitués à emprunter ces trains. 

Comme d’habitude depuis le début de notre périple ferroviaire, je suis d’ores et déjà gêné de le voir se restaurer sur sa couchette “upper” me semblant bien inconfortable pour l’exercice. 

Les voyageurs Russe semblent en être pourtant très coutumiers. 

Je lui propose de descendre s’installer avec nous, bien que les tables de ces cabines soient si petites que le terme de promiscuité prend alors tout son sens car cette opportunité semble peu envisageable. 

Alex, nous avons fait désormais connaissance, refuse bien évidemment mon offre avec une politesse à l’image de son apparence, élégante et discrète... je ne vous cache pas que ce refus me satisfait, pouvant ainsi occuper l’espace nécessaire à notre French breakfast !

J’ignore les raisons qui font que cette traversée en train est en elle seule une aventure, mais il s’agit, je le ressens comme tel, du meilleur tronçon depuis le début et donc peut être l’un des meilleurs moments Russe ! 

Quelques heures avant notre arrivée a Vladivostok, j’ecris Ces quelques lignes avec un sentiment de nostalgie à l’idée de mettre un terme à ce  voyage en “Ultra Train”.

Une sorte d’endurance ferroviaire qui nécessite solidarité, partage, introspection et permet la réussite de l’épopée qui n’est pas sans me rappeler un passé sportif récent et jouissif ! 

Dans cette première journée nous comprenons vite que notre escapade russe prend une autre dimension et me fait un peu regretter le choix d’avoir ponctué le trajet d’autant d’escales...  Comme si, nous avions passé trop de temps aux “ravitaillements” pour apprécier comme il se doit ce voyage dans le voyage !




Nous allons vivre la moitié de la semaine ici, dans cette cabine, avec ces voisins de wagon, ce personnel de la RZD qui se démène pour que l’hygiène des lieux soit irréprochable malgré un matériel archaïque. 

Nous profiterons des quelques minutes allouées pour nous dégourdir les jambes, lors de courtes escales de jour comme de nuit, quand les descentes nous sont autorisées.

C’est certain, ces 3 derniers jours sur le tronçon en train le plus long de la planète vont passer très vite, trop vite...  alors, nous nous mettons « rapidement », car cette notion est très relative dans cet endroit, à faire connaissance avec Alex, qui seulement après quelques heures finira par nous « avouer » que sa profession est d’enseigner l’anglais, ici, en Russie !!  

Décidément, I’m a lucky man... apprendre et partager sur la culture Russe en améliorant mon anglais. Comment ne pas être extrêmement heureux ?

Bien évidemment, je me met également en position du « parfait » élève que je n’ai jamais été, en essayant de respecter au mieux ce que j’ai acquis ces derniers mois. 

Je sors également mon petit carnet gris sur lequel je prend soin de noter verbes importants, adjectifs, adverbes, vocabulaire que je suppose utile et expressions en tout genre..  Je vais enfin utiliser le “had been + verbe en ing” ! Alex m’expliquera une nouvelle fois car Aline, avait depuis le début de l’année pris soin d’insister sur ce point que nous couvrons pourtant 90% des discussions du passé avec le “prétérit”... notamment les “fainéants” américains..... 

Le plaisir est d’autant plus intense lors d’une longue partie de cartes à 4 en cette fin d’après midi où le soleil traversant les vitres non occultantes de ce wagon soviétique, nous brûle. Pierre et Stéphanie échangent également naturellement et simplement en anglais, afin de ne rater aucun “tricks”.... pour gagner aux cartes, on peut facilement laisser sa timidité de côté et se trouver des vertus linguistiques.




Les interminables discussions de la soirée entraîneront une nuit “translate”, mes rêves non encore “so British” devant être traduits systématiquement dans mes pensées.

Au réveil, je me demande bien comment les bilingues articulent cette gymnastique dans leur cerveau...  cette idée me fascine et m’excite à la fois, même si la perspective me semble bien lointaine.

Alex est bel et bien Russe, peu souriant, surtout au levé du lendemain matin. A moins qu’il soit timide et pudique, finalement comme le sont peut être beaucoup de ses concitoyens. 

C’est d’ailleurs ce qu’il nous expliquera lors de l’une de nos discussions, afin de répondre à notre interrogation sur la sensation de « froideur » que nous avons eu à leurs contacts... 

J’avais compris la veille qu’il quitterai le train ce jour. 

Dans la matinée, je lui demande de nous en préciser l’heure. Après qu’il m’ait confirmé 17h09, nous décidons de l’inviter au wagon restaurant pour le déjeuner ! Nous avions promis à Pierre également cette sortie « gastronomique » dans le wagon juste à côté pour avoir la sensation d’une oxygénation collective !!! 

Autour d’un bortsch RZD, qui n’a rien de comparable avec notre sandwich « SNCF » puisque celui ci est délicieux, nous continuons  le tour d’horizon de nos vies respectives. 

Quoi de plus surprenant d’étaler sa vie, comme ça, simplement, en cherchant les mots dans un anglais approximatif, je parle désormais pour moi, mon professeur Russe me corrigeant régulièrement à ma demande, à un parfait inconnu que l’on ne reverra très certainement jamais ? 

Certainement la magie de cet endroit insolite, propre à ce genre d’opportunités tout autant attendues pour des voyageurs que nous sommes, qu’improbables ou rares pour ces locaux, c’est ce que nous confiera Alex, ému à son départ ! 




Malgré ses 25 ans, celui ci nous avait quelque peu intégré et protégé durant ces 2 premiers jours de trajet qui vont nous faire rallier Vladivostok.. Nous sommes donc orphelins lorsqu’il nous quitte et nous sommes bien curieux de connaître son successeur masculin ou féminin... 

Ce ne sera pas pour tout de suite puisque nous nous coucherons seuls dans notre cabine, pour ce second soir. 

Englués dans un sommeil assez profond, celui ci va se voir bien perturbé vers 1h30, quand quelques secondes après un arrêt bref dans une petite gare, un voyageur tente avec beaucoup de difficultés de faire rentrer sa valise trop lourde et trop remplie dans le local prévu à cet effet, en hauteur au dessus du couloir, bref un endroit exigüe et peu accessible où j’avais pris soin de ranger nos victuailles.....quand je dis qu’il faut voyager léger, cela prend régulièrement tout son sens depuis le début de notre voyage !




Bien qu’il n’y puisse pas grand chose, après avoir enfin réussi à caser sa valise, celui ci fini par s’étaler sur sa couchette après nous avoir copieusement réveillé, sauf Pierre qui présente un sommeil des plus profonds...

Quelques secondes et voilà parti notre nouveau compagnon dans un ronronnement tel, que je me dois de vérifier que mes boules Q visant à calfeutrer mon conduit auditif, sont bien introduites dans mon oreille ! 

À mon grand désespoir, tout est en ordre de ce point de vue ! Il va donc de soit que le bruit de ferraille que j’aime tant, du wagon soviétique glissant sur le chemin de fer, ne suffit plus à me bercer.

Quelques minutes après, ou heures d’ailleurs, notre train marque un arrêt que je suppose long, puisque j’entends nos voisins de wagon se précipiter à l’extérieur pour une balade nocturne. 

N’arrivant plus à trouver le sommeil, je fais de même.

Tels des acteurs d’un film fin seventies de Romero ou de la série plus récente “The Walking Dead”, les voilà, déambulant à 3h du matin, sur le quai de cette gare s’identifiant à une sorte de “Zombie-station”.

Certains conversent discrètement, d’autres (dont moi) profitent de ce rare instant pour vérifier que le “machin-phone” est connecté au monde réel..  que dis-je “virtuel”...   car je suis bien ici dans la réalité quelque part entre Oulan-Oude et la “capitale” du bout du monde.





Je profite de cet opportun réveil et du décalage avec la France, pour un appel à l’une de mes filles. Cette conversation semble d’ailleurs amuser quelque peu mes voisins de quai compte tenu de l’horaire tardif.

Je finirais ensuite par retrouver le sommeil, profitant d’un rare instant où mon compagnon de couchette “upper” semble apaiser son éruption respiratoire. 

Je suis également en couchette haute, Pierre et Stéphanie préférant éviter les contorsions pour adopter la position allongée.

Le lendemain, notre compagnon passera l’essentiel de son temps à continuer sa nuit en plein jour, couvrant de son grognement le si joli bruit de ce train...  Il semble très peu enclin à une conversation ou même une tentative, nous ne serons donc pas fâchés de le voir quitter notre cabine en fin d’après midi.




Je constate quelques gares plus tard, car la mesure du temps semble désormais plus quantifiables en “gares” qu’en “heures”, que notre abonnement téléphonique Russe semble être arrivé à son terme, recevant un message peu compréhensible.

J’apostrophe Kirill (Cyril en Français !) voisin de wagon, que j’ai déjà pas mal croisé, et lui adresse quelques mots en anglais. 

Ce jeune homme d’à peine 20 ans, me répond avec une évidente volonté de me venir en aide pour comprendre le message de mon opérateur de téléphonie Russe.

Dans une des prochaines gares, nous remettrons du jus dans “l’outil-phone” afin de pouvoir réserver notre hébergement du “bout du monde” et continuer à utiliser nos GPS dès notre arrivée... 

J’ai profité de cette interpellation pour faire une nouvelle connaissance. 

Kirill, semble lui aussi enthousiaste et nous demande d’adresser quelques mots en Français dans une vidéo qu’il se propose de réaliser pour sa maman, qui adore la langue de Molière. Avec Pierre, nous nous livrons à l’exercice avec un plaisir certain. 

Nous aurons une longue conversation précédant sa descente définitive du train en gare de Khabarovsk et me confiera son envie de voyager, bien que ses études de “détective privé”  lui imposent pour le moment une sédentarisation obligatoire.

Nous passerons cette dernière nuit en train presque routinière après avoir “craqué” lors d’un passage dans une gare où les vendeuses locales nous ont “imposé” l’achat de caviar rouge à base d’œufs de saumon ou de truite ainsi que d’un filet fumé des mêmes poissons, accompagnés de quelques gâteaux “homemade”...    un délice !!!




Après que notre hôtesse ait pris soin de frapper à la porte de notre cabine au petit matin, nous arrivons en gare de Vladivostok à 6h38...    

Sous une pluie fine, mais avec une température clémente, nous rejoignons notre hôte après quelques centaines de mètres en bus pour aménager dans notre appartement, réservé à bord du train en entrant en gare, quelques minutes avant l’arrivée.




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